Emplacement réservé : précisions sur les possibilités d'y délivrer un permis de construire
Publié le :
02/10/2023
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Un permis de construire portant sur un emplacement réservé ne peut être délivré que si le projet est compatible avec la destination assignée à l'emplacement réservé.
Une société a déposé une demande de permis de construire pour la création d'un ensemble commercial. Par un arrêté, le maire de la commune de Vidauban a délivré un permis de construire à cette société pour la réalisation du projet. Une association a demandé au juge administratif l'annulation de cet arrêté, au motif que le permis de construire litigieux méconnaissait les dispositions du règlement du plan de prévention des risques naturels d'inondation de la commune.
La cour administrative d'appel de Marseille, par un arrêt du 5 juillet 2021, a rejeté la requête.
Le Conseil d'Etat, dans un arrêt rendu le 19 juillet 2023 (requête n° 456409), annule l'arrêt d'appel. La Haute juridiction administrative rappelle qu'au titre de l'article L. 151-41 du code de l'urbanisme, l'autorité administrative chargée de délivrer le permis de construire est tenue de refuser toute demande, même émanant de la personne bénéficiaire de la réserve, dont l'objet ne serait pas conforme à la destination de l'emplacement réservé, tant qu'aucune modification du plan local d'urbanisme (PLU) emportant changement de la destination n'est intervenue. Néanmoins, un permis de construire portant à la fois sur l'opération en vue de laquelle l'emplacement a été réservé et sur un autre projet peut être légalement délivré, dès lors que ce dernier projet est compatible avec la destination assignée à l'emplacement réservé. En l'espèce, le terrain d'assiette du projet était grevé d'une servitude d'emplacement par le PLU de la commune pour la réalisation d'une voie de circulation. L'emplacement ayant été réservé pour la réalisation de voies de circulation, l'arrêté litigieux, délivrant un permis de construire pour la construction de bâtiments, doit être annulé. Le Conseil d'Etat annule l'arrêt d'appel et l'arrêté du 8 juillet 2020.
EXTRAIT DE L'ARRET RENDU PAR LE CONSEIL D'ETAT :
« 1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société K-Dis Immobilier a déposé, le 1er juillet 2019, une demande de permis de construire pour la création d'un ensemble commercial d'une surface de vente totale de 2 196 m2. Le projet a reçu un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial du Var le 20 septembre 2019. Saisie d'un recours formé, notamment, par l'association Les moulins de Vidauban, la Commission nationale d'aménagement commercial a émis un avis favorable au projet le 10 juin 2020. Par un arrêté du 8 juillet 2020, le maire de Vidauban a délivré un permis de construire à la société K-Dis Immobilier pour la réalisation de ce projet. L'association Les moulins de Vidauban se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 5 juillet 2021 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'association Les moulins de Vidauban soutenait devant ceux-ci que le permis de construire litigieux méconnaissait les dispositions du chapitre 5 du règlement du plan de prévention des risques naturels d'inondation de la commune de Vidauban aux termes desquelles, dans les zones exposées à un aléa exceptionnel, sont " interdits, sauf à démontrer par une étude technico-économique l'avantage du projet par rapport à une implantation sur un terrain non exposé au risque inondations : (...) - les établissements susceptibles de drainer une population importante (à titre indicatif : ) 1 500 personnes) ". En omettant de répondre à ce moyen, qui n'était pas inopérant dès lors que, contrairement à ce qui est soutenu, l'interdiction prévue par ces dispositions ne concerne pas seulement les établissements recevant du public de première catégorie mais l'ensemble des établissements susceptibles de drainer, y compris par leur cumul, une population importante, la cour administrative d'appel a entaché son arrêt d'insuffisance de motivation.
3. En second lieu, aux termes de l'article L. 151-41 du code de l'urbanisme : " Le règlement peut délimiter des terrains sur lesquels sont institués : / 1° Des emplacements réservés aux voies et ouvrages publics dont il précise la localisation et les caractéristiques ; / (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'autorité administrative chargée de délivrer le permis de construire est tenue de refuser toute demande, même émanant de la personne bénéficiaire de la réserve, dont l'objet ne serait pas conforme à la destination de l'emplacement réservé, tant qu'aucune modification du plan local d'urbanisme emportant changement de la destination n'est intervenue. En revanche, un permis de construire portant à la fois sur l'opération en vue de laquelle l'emplacement a été réservé et sur un autre projet peut être légalement délivré, dès lors que ce dernier projet est compatible avec la destination assignée à l'emplacement réservé.
4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à la date du permis de construire litigieux, le terrain d'assiette du projet était grevé d'une servitude d'emplacement réservé par le plan local d'urbanisme de la commune de Vidauban pour la réalisation d'une voie de circulation entre le rond-point de sainte-Brigitte et l'avenue de la Résistance.
5. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 qu'en se fondant, pour écarter le moyen tiré de l'illégalité du permis de construire litigieux autorisant la construction de bâtiments sur cet emplacement réservé, sur la circonstance que la construction d'une voie de circulation reliant le rond-point de sainte-Brigitte et l'avenue de la Résistance restait possible sur un autre emplacement du terrain d'assiette du projet, sans rechercher si le permis de construire litigieux portait sur cette opération, en vue de laquelle l'emplacement a été réservé, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit. »
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