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Coronavirus : quelles sont les mesures spéciales d'accompagnement des entreprises face au destructeur covid-19 ?

Coronavirus : quelles sont les mesures spéciales d'accompagnement des entreprises face au destructeur covid-19 ?

Publié le : 23/03/2020 23 mars mars 03 2020

Depuis le 16 mars 2020, un confinement est imposé aux français pour une durée minimale de 15 jours afin de freiner la propagation du coronavirus covid-19. Les déplacements sont limitativement autorisés et conditionnés par la présentation d’une attestation de déplacement dérogatoire. Plusieurs mesures supplémentaires de restriction interviendront à la suite de la déclaration de l’état d’urgence sanitaire qui faite par le Premier ministre, suite à l’adoption par le Parlement avec plusieurs amendements du projet de loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19.
 
Afin de soutenir les entreprises françaises durant cette période de crise sanitaire, le gouvernement a décidé d’intervenir et de prendre des mesures d’urgence économique.
 
Voyons quelles sont les mesures d’accompagnement que l’Etat prévoit d’accorder aux entreprises afin de traverser cette crise sans précédent.
 
 
 
La modification des délais de paiement d’échéances sociales et/ou fiscales (URSSAF, impôts directs)
 
 
  • Échéances sociales :
 
Habituellement, les cotisations Urssaf sont dues par les entreprises à échéances régulières en fonction de la taille de l’entreprise et du nombre de salariés.
 
Article R. 243-6 du code de la sécurité sociale modifié par l’article 1er du décret n° 2007-707 du 4 mai 2007 :
 
“ I.- Les cotisations dues au titre des assurances maladie, maternité, invalidité, vieillesse, décès, des accidents du travail et des allocations familiales sont versées par les employeurs aux organismes de recouvrement dont relève chacun de leurs établissements (...)
 
III.- Pour déterminer la date, la périodicité et le lieu de versement des cotisations, les effectifs des salariés sont calculés au 31 décembre de chaque année, en tenant compte de tous les établissements de l'entreprise ; les éventuels changements du régime de versement des cotisations entraînés par les modifications constatées d'une année sur l'autre prennent effet, pour le calcul des cotisations assises sur les rémunérations versées, à compter du 1er avril suivant ou, lorsque l'entreprise entre dans le champ des dispositions du deuxième alinéa du I, à compter du 1er janvier de la deuxième année suivante.”
 
La première mesure gouvernementale permet aux employeurs de décaler la date d’échéance de prélèvement Urssaf. Durant cette période de crise sanitaire les entreprises sont donc autorisées à déroger à l'application de ces dispositions.
 
Il est précisé que les employeurs dont la date d'échéance d’Urssaf est au 15 du mois peuvent reporter la totalité ou une partie du paiement de leurs cotisations salariales et patronales jusqu'au 19 mars 2020.
 
Lorsque l’employeur choisit de reporter une partie des cotisations, il a la possibilité de reporter jusqu’à trois mois le paiement des cotisations sans aucune pénalité.
 
 
  • Les démarches à effectuer pour les employeurs :
 
Les employeurs peuvent moduler leur paiement en fonction de leurs besoins c’est-à dire qu’ils pourront déclarer un montant à 0, ou un montant correspondant à une partie des cotisations.
Pour les employeurs dont la date d’échéance intervient le 15 du mois :
 
  • Lorsque l’employeur a déjà déposé sa déclaration sociale nominative (DSN) de février 2020 : il peut modifier son paiement jusqu’au jeudi 19 mars à 12h00, en modifiant son paiement Urssaf sur le site urssaf.fr.
 
  • Lorsque l’employeur règle ses cotisations hors DSN : il peut adapter le montant de son virement bancaire, ou bien ne pas effectuer de virement.
 
  • L’employeur peut continuer d'échelonner le règlement des cotisations patronales comme habituellement.
 
L'employeur devra se connecter à son espace en ligne sur urssaf.fr et signaler sa situation via la messagerie : “ Nouveau message” / “Une formalité déclarative ” / ” Déclarer une situation exceptionnelle ”.
 
De même, il pourra joindre l’Urssaf par téléphone au 3957 (0,12€ / min + prix appel).
 
Pour les employeurs dont la date d’échéance intervient le 5 du mois, ils seront informés prochainement des démarches à effectuer concernant leur échéance du 5 avril 2020.
 
Enfin, concernant les cotisations de retraite complémentaire, les employeurs doivent se rapprocher de leur institution de retraite complémentaire afin de connaître les possibilités de report des paiements des cotisations.
 
 
  • Les démarches à effectuer pour les travailleurs indépendants :
 
Tout d’abord, le gouvernement prévoit la suppression du prélèvement de l'échéance mensuelle du 20 mars. Ce prélèvement sera remplacé par un lissage du montant sur les échéances ultérieures prévues entre avril et décembre 2020.
 
Ensuite, il sera possible pour les travailleurs indépendants :
 
  • d’obtenir un délais de paiement sans majoration de retard ni de pénalité ;
  • un ajustement de l’échéancier des cotisations afin de prendre en compte la baisse des revenus ;
  • d’obtenir la prise en charge partielle ou totale des cotisations par l’action sociale ;
  • d’obtenir une aide financière exceptionnelle.
 
Les travailleurs indépendants disposent de différents moyens pour contacter les services concernés :
   
  • Par téléphone au 3698 (service gratuit + prix appel)
 
  • Pour les professions libérales :  urssaf.fr ou par téléphone, contacter l’Urssaf au 3957 (0,12€ / min + prix appel) ou au 0806 804 209 (service gratuit + prix appel) pour les praticiens et auxiliaires médicaux.
 
 
 
  • Echéances fiscales :
 
 
  • Les options pour les entreprises
 
Les entreprises sont normalement soumises aux paiements périodiques des acomptes d'impôts sur les sociétés. Ainsi, l’article 360 du Code général des impôts prévoit :
 
“ Les acomptes sont calculés par la société et versés par elle sans avis d'imposition dans les vingt premiers jours des mois de février mai août et novembre de chaque année à la caisse du comptable du Trésor chargé du recouvrement des impôts directs du lieu d'imposition défini par l'article 218 A du code général des impôts. “
 
Dans ce contexte de crise, le gouvernement permet aux entreprises de demander le report sans pénalité du règlement de leurs prochaines échéances d'impôts directs (acompte d'impôt sur les sociétés, taxe sur les salaires).
 
Lorsque les entreprises ont déjà réglé leurs échéances de mars elles peuvent faire opposition au prélèvement SEPA auprès de leur banque, ou bien demander le remboursement auprès du service des impôts des entreprises (SIE), qui leur sera accordé.
 
 
  • Les options pour les travailleurs indépendants
 
Les travailleurs indépendants, peuvent moduler à tout moment le taux et les acomptes de prélèvement à la source. Également, il leur est aussi possible de reporter le paiement de leurs acomptes de prélèvement à la source sur leurs revenus professionnels en fonction de la périodicité initialement choisie (acomptes mensuels ou trimestriels).
 
Les démarches doivent être effectuées sur impots.gouv.fr, avant le 22 du mois pour être prises en compte le mois suivant.
 
Enfin, les paiements du CFE ou de la taxe foncière sont suspendus sur demande via le site impots.gouv.fr ou en contactant le Centre prélèvement service.
 
 
Les remises d'impôts directs
 
Si une entreprise est confrontée à des difficultés de paiement liées au virus, elle peut solliciter du comptable public un plan de règlement afin d’étaler ou reporter le paiement de sa dette fiscale.
 
Dans l’hypothèse où le plan mis en place est insuffisant, une remise des impôts directs (impôt sur les bénéfices, contribution économique territoriale etc.) sera possible.
 
Le bénéfice de ces mesures gracieuses est soumis à un examen individualisé des demandes tenant compte de la situation et des difficultés financières des entreprises.
 
 
Les aides financières pour les plus petites entreprises
 
Un fonds de solidarité a été mis en place afin de venir en aide aux plus petites entreprises qui souffrent de la situation économique actuelle. Ce fonds de solidarité est financé par L’État, les Régions et certaines grandes entreprises. Une aide de 1500 euros sera versée aux petites entreprises en difficulté.
 
Les entreprises concernées par ce fonds de solidarité seront énumérées plus précisément par le décret d’application à venir. En attendant, les mesures énoncées visent :
 
  • Les petites entreprises de moins d’un million d’euros de chiffre d’affaires : TPE, indépendants et micro-entrepreneurs des secteurs les plus impactés, (commerces non alimentaires, restaurants, etc.) mais aussi l’hébergement, le tourisme, les activités culturelles et sportives, l’événementiel et les transports.
 
  • Les petites entreprises ou les indépendants qui subissent une fermeture administrative ou qui auront connu une perte de chiffre d'affaires de plus de 70% au mois de mars 2020 par rapport au mois de mars 2019 peuvent bénéficier d'une aide de 1 500 euros sur simple déclaration.
 
L’ouverture de cette aide est prévue à partir du 31 mars 2020. Les entreprises concernées devront saisir une déclaration sur le site de la DGFIP.
 
 
Le report du paiement des loyers, des factures d'eau, de gaz et d’électricité pour les plus petites entreprises en difficulté
 
Il est désormais possible de reporter le paiement des loyers, factures d’eau, de gaz et d’électricité pour les plus petites entreprises en difficulté.
 
Afin de bénéficier de ces reports, il faut adresser une demande de report à l’amiable (par mail ou par téléphone) aux fournisseurs d'électricité, gaz, d’eau ou encore bailleur concernés.
 
 
 
Les prêts de trésorerie garantis par l’État
 
Le gouvernement prévoit également la mise en place d’un dispositif de garantie permettant de soutenir le financement bancaire des entreprises. L’objectif est de faciliter l’obtention de prêts de trésorerie par les entreprises afin que celles-ci puissent maintenir leur activité et préserver l’emploi.
 
Sont concernés tous les nouveaux prêts de trésorerie accordés à partir du 16 mars et jusqu’au 31 décembre 2020. Ces prêts ne pourront pas faire l’objet d'autre garantie ou sûreté.
 
Par ailleurs, les banques françaises se sont engagées à reporter jusqu’à 6 mois le remboursement de crédits des entreprises, sans frais.
 
Afin de bénéficier de ce dispositif, les entreprises doivent contacter leur banque.
 
 
La médiation du crédit
 
Le gouvernement prévoit la mise en place d’une médiation bancaire afin que les entreprises négocient avec leur banque un rééchelonnement des crédits bancaires.
 
La médiation du crédit est un dispositif connu qui a déjà fait ses preuves dans le passé aidant toute entreprise qui rencontre des difficultés avec un ou plusieurs établissements financiers (banques, crédit bailleurs, sociétés d'affacturage, assureurs-crédit, etc.).
 
Ce dispositif est notamment évoqué dans le code monétaire et financier.
 
Article L. 316-1 du code monétaire et financier modifié par l’article 7 de l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 :
 
“ Tout consommateur a droit de recourir gratuitement à un médiateur dans les conditions prévues au chapitre II du titre Ier du livre VI du code de la consommation en vue de la résolution d'un litige qui l'oppose à un établissement de crédit, une société de financement, un établissement de monnaie électronique, un établissement de paiement ou un prestataire de services d'information sur les comptes et relatif aux services fournis et à l'exécution de contrats conclus dans le cadre du présent titre et du titre II du présent livre et relatifs aux produits mentionnés aux titres Ier et II du livre II. ”
 
Les entreprises qui souhaitent en bénéficier doivent saisir le médiateur du crédit sur internet.
 
 
La mise en place du dispositif de chômage partiel simplifié et renforcé
 
Afin d’éviter la suppression des emplois et ainsi favoriser le maintien de l’activité économique des entreprises, le gouvernement déploie largement la mise en place du dispositif de chômage partiel dans les entreprises prévu par le Code du travail.
 
Article R. 5122-1 du code du travail modifié par l’article 1er du décret n° 2012-1271 du 19 novembre 2012 :
 
“ L'employeur peut placer ses salariés en position de chômage partiel lorsque l'entreprise est contrainte de réduire ou de suspendre temporairement son activité pour l'un des motifs suivants :
 
1° La conjoncture économique ;
 
2° Des difficultés d'approvisionnement en matières premières ou en énergie ;
 
3° Un sinistre ou des intempéries de caractère exceptionnel ;
 
4° La transformation, restructuration ou modernisation de l'entreprise ;
 
5° Toute autre circonstance de caractère exceptionnel. ”
 
Le dispositif permet aux entreprises de verser une indemnité égale à 70% du salaire brut (environ 84 % du net) aux salariés. Les salariés au SMIC ou moins sont indemnisés à 100%. L’entreprise sera intégralement remboursée par l’Etat, pour les salaires jusqu’à 6 927 euros bruts mensuels, c’est à dire 4,5 fois le SMIC.
 
Pour en bénéficier, les entreprises doivent être dans une situation économique qui les contraint de réduire ou de suspendre leur activité. Elles doivent alors déposer une demande d’activité partielle en ligne sur le site du ministère du Travail dédié au chômage partiel.
 
Depuis le 16 mars, les entreprises ont 30 jours pour réaliser leur demande de chômage partiel, avec effet rétroactif.
 
 
L’intervention du Médiateur des entreprises
 
Le médiateur des entreprises a pour objectif le règlement des litiges liés à l'exécution d’un contrat de droit privé ou d’une commande publique. Ainsi, les contentieux liés par exemple aux retards de paiement ; services ou marchandises non conformes sont concernés.
 
Article R. 2197-23 du code de la commande publique modifié par le décret n° 2018-1075 du 3 décembre 2018 :
 
“ En cas de différend concernant l'exécution des marchés, les acheteurs et les titulaires peuvent recourir au médiateur des entreprises.
 
Le médiateur des entreprises agit comme tierce partie, sans pouvoir décisionnel, afin d'aider les parties, qui en ont exprimé la volonté, à trouver une solution mutuellement acceptable à leur différend. “
 
Pour bénéficier de la médiation d’entreprises, une demande en ligne sur le site du médiateur des entreprises doit être effectuée : economie.gouv.fr/mediateur-des-entreprises.
 
 
L’intervention de la Commission des chefs de services financiers (CCSF)
 
Les entreprises qui rencontrent des difficultés financières peuvent solliciter la Commission des chefs de services financiers (CCSF) afin d'obtenir des délais de paiement pour s’acquitter de leurs dettes fiscales et sociales (part patronale) en toute confidentialité.
 
Pour bénéficier de cette aide, le débiteur doit formuler la demande auprès de la Commission ou bien du mandataire ad hoc.
 
La recevabilité de la demande est conditionnée par la mise à jour du dépôt des déclarations fiscales et sociales et du paiement des cotisations et contributions salariales ainsi que du prélèvement à la source du débiteur. De même, il ne doit pas avoir été condamné pour travail dissimulé.
 
Les dettes visées sont notamment les impôts, les taxes, les cotisations sociales aux régimes obligatoires de base exigibles à l'exclusion des parts salariales et du prélèvement à la source. Notons qu’il n’y a pas de montant minimum ou maximum.
 
 
Le coronavirus covid-19 a bousculé les codes et les comportements sociaux au point de créer une distanciation dans les rapports humains, dans une atmosphère anxiogène qui nécessairement impacte négativement le moral de toutes et de tous. Si l’ensemble des mesures gouvernementales annoncées va dans le bons sens, il faudra beaucoup plus et un véritable plan Marshall pour contrebalancer le fort ralentissement ou encore pour reconstruire toute l’activité économique française qui est en passe de s’effondrer. Les prochaines semaines devraient donner plus de visibilité aux entreprises et au gouvernement afin de savoir quelles sont les mesures qui devront impérativement être renforcées, dans le prolongement des mesures contenues notamment dans le projet de loi rectificative pour 2020 adopté le jeudi 19 mars 2020 par l’Assemblée nationale et le vendredi 20 mars 2020 par le Sénat.
 
 
Patrick Lingibé
Vice-Président de la Conférence des Bâtonniers de France
Ancien membre du Conseil national des barreaux
Bâtonnier
Avocat associé Cabinet JURISGUYANE
Spécialiste en droit public
Diplômé en droit routier
Médiateur Professionnel
Membre du réseau d'avocats EUROJURIS
Membre de l'Association des Juristes en Droit des Outre-Mer (AJDOM)

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