CJUE : le refus de remboursement de soins créant une différence de traitement fondée sur la religion peut être justifié
Publié le :
09/11/2020
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Un Etat peut refuser d’accorder une autorisation préalable pour le remboursement des coûts de soins de santé transfrontaliers lorsqu’un traitement hospitalier efficace est disponible dans cet Etat mais que les croyances religieuses de l’affilié réprouvent le mode de traitement utilisé. Ce refus n’est pas contraire au droit de l’Union s’il est objectivement justifié par un but légitime tenant au maintien d’une capacité de soins de santé ou d’une compétence médicale et constitue un moyen approprié et nécessaire permettant d’atteindre ce but.Un enfant devait subir une opération à cœur ouvert. Cette opération était disponible dans son Etat membre d’affiliation, la Lettonie, mais ne pouvait être réalisée sans transfusion sanguine. Or, le père de l’enfant s’est opposé à ce mode de traitement au motif qu’il était témoin de Jéhovah, et a dès lors demandé au Nacionālais veselības dienests (service national de santé, Lettonie) de délivrer une autorisation permettant à son fils de bénéficier de soins de santé programmés en Pologne, où l’opération pouvait être effectuée sans transfusion sanguine. Sa demande ayant été refusée, le père a introduit un recours contre la décision de refus du service de santé. Ce recours a été rejeté par un jugement en première instance, qui a été confirmé en appel. Entre-temps, le fils durequérant au principal a été opérédu cœur en Pologne, sans transfusion sanguine.
Dans son arrêt du 29 octobre 2020 (affaire C-243/19), la Cour de justice de l’Union européenne a dit pour droit, en premier lieu, que l’article 20, paragraphe 2, du règlement nº 883/2004, lu à la lumière de l’article 21, paragraphe 1, de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, ne s’oppose pas à ce que l’Etat membre de résidence de l’assuré refuse d’accorder à ce dernier l’autorisation prévue à l’article 20, paragraphe 1, de ce règlement lorsque, dans cet Etat membre, un traitement hospitalier, dont l’efficacité médicale ne soulève aucun doute, est disponible mais que les croyances religieuses de cet assuré réprouvent le mode de traitement utilisé.À cet égard, la Cour a notamment constaté que le refus d’accorder l’autorisation préalable prévue par le règlement nº 883/2004 introduit une différence de traitement qui est indirectement fondée sur la religion ou les croyances religieuses, puisque les patients qui subissent une intervention médicale avec transfusion sanguine sont couverts par la sécurité sociale de l’Etat membre de résidence, tandis que ceux qui, pour des raisons religieuses, décident de recourir, dans un autre Etat membre, à un traitement auquel ne s’opposent pas leurs croyances religieuses, ne bénéficient pas d’une telle couverture.Une telle différence de traitement est justifiée dès lors qu’elle est fondée sur un critère objectif et raisonnable et qu’elle est proportionnée au but poursuivi.La Cour en a conclu que, en l’absence d’un régime d’autorisation préalable axé sur des critères exclusivement médicaux, l’Etat membre d’affiliation serait exposé à une charge financière additionnelle, difficilement prévisible et susceptible d’entraîner un risque pour la stabilité financière de son système d’assurance maladie. Par conséquent, l’absence de prise en compte des croyances religieuses de l’intéressé apparaît comme une mesure justifiée au regard de l’objectif précité, qui satisfait à l’exigence de proportionnalité.
En second lieu, la CJUE précise que l’article 8, paragraphes 5 et 6, sous d), de la directive 2011/24, lu à la lumière de l’article 21, paragraphe 1, de la Charte, s’oppose à ce que l’Etat membre d’affiliation d’un patient refuse d’accorder à ce dernier l’autorisation prévue à l’article 8, paragraphe 1, de cette directive lorsque, dans cet Etat membre, un traitement hospitalier, dont l’efficacité médicale ne soulève aucun doute, est disponible mais que les croyances religieuses de ce patient réprouvent le mode de traitement utilisé, à moins que ce refus ne soit objectivement justifié par un but légitime tenant au maintien d’une capacité de soins de santé ou d’une compétence médicale et constitue un moyen approprié et nécessaire permettant d’atteindre ce but, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier.
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