ATTENTION AU RISQUE DE NE PAS DECLARER SON SOUS-TRAITANT : LE RAPPEL DE LA CJUE A MEDITER
Publié le :
29/12/2019
29
décembre
déc.
12
2019
Dans un arrêt rendu le 3 octobre 2019, affaire C-267/18, Delta Antrepriză de Construcţii şi Montaj 93 SA contre Compania Naţională de Administrare a Infrastructurii Rutiere SA, la Cour de justice de l'Union européenne a jugé que l’article 57, paragraphe 4, sous g), de la directive 2014/24/UE du Parlement européen et Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE doit être interprété en ce sens que la sous-traitance, par un opérateur économique, d’une partie des travaux dans le cadre d’un marché public antérieur, décidée sans le consentement du pouvoir adjudicateur et qui a donné lieu à la résiliation de ce marché, constitue une défaillance importante ou persistante constatée lors de l’exécution d’une obligation essentielle afférente au marché, au sens de ladite disposition.
Considérant 38 de l’arrêt :
« Dans ces conditions, il y a lieu de répondre à la question posée que l’article 57, paragraphe 4, sous g), de la directive 2014/24 doit être interprété en ce sens que la sous-traitance, par un opérateur économique, d’une partie des travaux dans le cadre d’un marché public antérieur, décidée sans le consentement du pouvoir adjudicateur et qui a donné lieu à la résiliation de ce marché, constitue une défaillance importante ou persistante constatée lors de l’exécution d’une obligation essentielle afférente audit marché, au sens de ladite disposition, et est donc de nature à justifier l’exclusion de cet opérateur économique de la participation à une procédure de passation de marché public ultérieure si, après avoir procédé à sa propre évaluation de l’intégrité et de la fiabilité de l’opérateur économique visé par la résiliation du marché public antérieur, le pouvoir adjudicateur qui organise cette procédure de passation de marché ultérieure estime qu’une telle sous-traitance entraîne la rupture du lien de confiance avec l’opérateur économique en cause. Avant de prononcer une telle exclusion, le pouvoir adjudicateur doit toutefois, conformément à l’article 57, paragraphe 6, de cette directive, lu en combinaison avec le considérant 102 de ladite directive, laisser la possibilité à cet opérateur économique de présenter les mesures correctives qu’il a adoptées à la suite de la résiliation du marché public antérieur. »
Article 57, paragraphe 4, sous g) de la directive 2014/24/UE :
« Motifs d’exclusion
(…)
4. Les pouvoirs adjudicateurs peuvent exclure ou être obligés par les États membres à exclure tout opérateur économique de la participation à une procédure de passation de marché dans l’un des cas suivants :
(…)
g) des défaillances importantes ou persistantes de l’opérateur économique ont été constatées lors de l’exécution d’une obligation essentielle qui lui incombait dans le cadre d’un marché public antérieur, d’un marché antérieur passé avec une entité adjudicatrice ou d’une concession antérieure, lorsque ces défaillances ont donné lieu à la résiliation dudit marché ou de la concession, à des dommages et intérêts ou à une autre sanction comparable ; »
Cette sous-traitance est donc de nature à justifier l’exclusion de cet opérateur économique de la participation à une procédure de passation de marché ultérieure si, après avoir procédé à sa propre évaluation de l’intégrité et de la fiabilité de l’opérateur économique visé par la résiliation du marché public antérieur, le pouvoir adjudicateur qui organise cette procédure de passation de marché ultérieure estime qu’une telle sous-traitance entraîne la rupture du lien de confiance avec l’opérateur économique en cause.
Toutefois, avant de prononcer une telle exclusion, le pouvoir adjudicateur doit, conformément à l’article 57, paragraphe 6, de cette directive, interprété au regard de la lecture du considérant 102 de directive précitée, laisser la possibilité à cet opérateur économique de présenter les mesures correctives qu’il a adoptées à la suite de la résiliation du marché public antérieur.
Considérant 102 de la directive 2014/24/UE :
« (102) Il convient cependant de laisser aux opérateurs économiques la possibilité de prendre des mesures de mise en conformité visant à remédier aux conséquences de toute infraction pénale ou faute et à empêcher effectivement que celles-ci ne se reproduisent. Il pourrait notamment s’agir de mesures concernant leur organisation et leur personnel, comme la rupture de toute relation avec des personnes ou des organisations impliquées dans ces agissements, des mesures appropriées de réorganisation du personnel, la mise en œuvre de systèmes de déclaration et de contrôle, la création d’une structure d’audit interne pour assurer le suivi de la conformité et l’adoption de règles internes de responsabilité et de réparation. Lorsque ces mesures offrent des garanties suffisantes, l’opérateur économique concerné ne devrait plus être exclu pour ces seuls motifs. Les opérateurs économiques devraient avoir la possibilité de demander que soient examinées les mesures de mise en conformité prises en vue d’une éventuelle admission à la procédure de passation de marché. Cependant, il convient de laisser aux États membres le pouvoir de déterminer les conditions procédurales et matérielles exactes qui seraient applicables dans ces cas. Ils devraient, en particulier, être libres de décider s’ils autorisent chaque pouvoir adjudicateur à effectuer les évaluations pertinentes ou s’ils confient cette tâche à d’autres pouvoirs à un niveau central ou décentralisé. »
Nous ne pouvons donc que recommander aux opérateurs économiques d’être transparents et de déclarer leur sous-traitant dans leurs marchés et contrats, cela afin d’éviter tout risque de rupture fondé sur la perte du lien de confiance avec le pouvoir adjudicateur.
Patrick Lingibé
Avocat spécialiste en droit public
Diplômé en droit routier
Cabinet JURISGUYANE
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