Non-renvoi de QPC : absence de recours contre l'acte de notoriété

Non-renvoi de QPC : absence de recours contre l'acte de notoriété

Publié le : 09/10/2024 09 octobre oct. 10 2024

La Cour de cassation a refusé de transmettre au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité relative à l’article 317 du code civil relatif à l’acte de notoriété, car elle ne présente pas de caractère sérieux.



Une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) relative aux dispositions du dernier alinéa de l'article 317, dans leur rédaction issue de la loi n° 2011-331 du 28 mars 2011 a été posée à la Cour de cassation.



Ces dispositions prévoient que l'acte de notoriété, qui établit la filiation par possession d'état, n'est susceptible d'aucun recours même dans l'hypothèse où il a été délivré par le juge en violation de la règle d'ordre public de l'article 320 du code civil selon laquelle la filiation légalement établie fait obstacle, tant qu'elle n'a pas été contestée en justice, à l'établissement d'une filiation qui la contredirait.



Ces dispositions sont-elles contraires aux droits et libertés garantis par la Constitution, notamment au droit au recours effectif et au principe d'égalité devant la loi prévus respectivement par les articles 16 et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ainsi qu'au droit de mener une vie familiale normale garanti par le dixième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 ?



Dans un arrêt du 3 septembre 2024 (pourvoi n° 24-11.220), la Cour de cassation estime que la question posée ne présente pas un caractère sérieux.



L'article 317 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, permet à chacun des parents ou à l'enfant de demander au juge d'instance que lui soit délivré un acte de notoriété qui fera foi de la possession d'état jusqu'à la preuve contraire.



Si, selon le dernier alinéa de ce texte, l'acte de notoriété n'est pas sujet à recours, l'article 335 du code civil prévoit cependant que la filiation établie par la possession d'état constatée par un acte de notoriété peut être contestée par toute personne qui y a intérêt en rapportant la preuve contraire dans le délai de dix ans à compter de la délivrance de l'acte.



En outre, aux termes de l'article 320 du code civil, tant qu'elle n'a pas été contestée en justice, la filiation légalement établie fait obstacle à l'établissement d'une autre filiation qui la contredirait.



Ainsi, dans l'hypothèse visée par la question, où l'acte de notoriété constatant la possession d'état viendrait contredire une filiation déjà légalement établie, la possession d'état constatée dans l'acte de notoriété se trouverait privée d'effet tant que la première filiation n'a pas été anéantie.



Il s'ensuit que, même dans l'hypothèse visée par la question, les dispositions contestées ne portent pas une atteinte substantielle au droit à un recours effectif ni à celui de mener une vie familiale normale.



En conséquence, la Cour de cassation a jugé il n'y a pas lieu de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel.



EXTRAIT DE L'ARRET DE LA COUR DE CASSATION :



Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité



7. A l'occasion du pourvoi qu'il a formé contre les arrêts rendus les 8 juin et 9 novembre 2023 par la cour d'appel de Montpellier, M. [E] a, par mémoire distinct et motivé, demandé de renvoyer au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée : « Les dispositions du dernier alinéa de l'article 317, dans leur rédaction issue de la loi n° 2011-331 du 28 mars 2011, sont-elles contraires aux droits et libertés garantis par la Constitution, notamment au droit au recours effectif et au principe d'égalité devant la loi prévus respectivement par les articles 16 et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ainsi qu'au droit de mener une vie familiale normale garanti par le dixième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, en ce qu'elles prévoient que l'acte de notoriété, qui établit la filiation par possession d'état, n'est susceptible d'aucun recours même dans l'hypothèse où il a été délivré par le juge en violation de la règle d'ordre public de l'article 320 du code civil selon laquelle la filiation légalement établie fait obstacle, tant qu'elle n'a pas été contestée en justice, à l'établissement d'une filiation qui la contredirait ? »



Examen de la question prioritaire de constitutionnalité



8. Le mémoire déposé n'explicitant pas en quoi la disposition critiquée porterait atteinte au principe d'égalité devant la loi, la question prioritaire de constitutionnalité est partiellement irrecevable.



9. La disposition contestée est applicable au litige, qui concerne la délivrance le 4 octobre 2018 par un juge d'instance d'un acte de notoriété constatant la possession d'état.



10. Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.



11. Cependant, d'une part, la question posée, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.



12. D'autre part, la question posée ne présente pas un caractère sérieux.



13. L'article 317 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, permet à chacun des parents ou à l'enfant de demander au juge d'instance que lui soit délivré un acte de notoriété qui fera foi de la possession d'état jusqu'à la preuve contraire.



14. Si, selon le dernier alinéa de ce texte, l'acte de notoriété n'est pas sujet à recours, l'article 335 du code civil prévoit cependant que la filiation établie par la possession d'état constatée par un acte de notoriété peut être contestée par toute personne qui y a intérêt en rapportant la preuve contraire dans le délai de dix ans à compter de la délivrance de l'acte.



15. En outre, aux termes de l'article 320 du code civil, tant qu'elle n'a pas été contestée en justice, la filiation légalement établie fait obstacle à l'établissement d'une autre filiation qui la contredirait.



16. Ainsi, dans l'hypothèse visée par la question, où l'acte de notoriété constatant la possession d'état viendrait contredire une filiation déjà légalement établie, la possession d'état constatée dans l'acte de notoriété se trouverait privée d'effet tant que la première filiation n'a pas été anéantie.



17. Il s'ensuit que, même dans l'hypothèse visée par la question, les dispositions contestées ne portent pas une atteinte substantielle au droit à un recours effectif ni à celui de mener une vie familiale normale.



18. En conséquence, il n'y a pas lieu de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel. "

 

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