Exonération de responsabilité civile décennale du contrôleur technique

Publié le : 02/10/2023 02 octobre oct. 10 2023

Le contrôleur technique peut être exonéré de sa responsabilité civile décennale s'il prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère, laquelle ne peut résulter des fautes commises par les autres intervenants à l'opération de construction.



En application de l'article 1792 du code civil et de l'article L. 111-24, devenu L. 125-2, du code de la construction et de l'habitation, le contrôleur technique est, dans les limites de la mission à lui confiée, responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.



Une telle responsabilité n'a point lieu si le contrôleur technique prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.



En l'espèce, se plaignant de désordres, une SCI a, après expertise, assigné les intervenants à l'acte de construire et leurs assureurs en réparation.



La cour d'appel de Bordeaux a rejeté les demandes formées à l'encontre de la société chargée de la mission de contrôle technique. Elle a relevé que la société n'avait reçu aucun dossier de conception digne de ce nom lui permettant de rédiger un rapport initial de contrôle technique et n'avait été sollicitée pour la première fois que plus de huit mois après la réception, de sorte qu'elle n'avait pu procéder à aucune constatation utile au cours des opérations de construction, n'ayant pu consigner, après achèvement, que les défauts de conformités, manques de finition, et désordres. Elle a jouté que son rapport initial n'aurait pas pu être établi au vu de "simples plans généraux" et qu'il est manifeste que, même si elle avait réclamé les pièces qui lui étaient nécessaires, elle n'en n'aurait pas obtenu davantage que l'expert judiciaire qui, malgré la durée des opérations d'expertise, n'a pu obtenir que des documents très partiels. Elle en a déduit que le contrôleur technique ayant été ainsi empêché d'exécuter sa mission, la SCI ne justifie d'aucun manquement à sa mission en relation de cause à effet avec les préjudices dont elles se plaignent.



Dans un arrêt du 14 septembre 2023 (pourvoi n° 22-13.375), la Cour de cassation casse l'arrêt d'appel sur ce point. Elle estime que la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision en se déterminant ainsi, après avoir constaté que l'expert avait noté que la présence du bureau de contrôle technique était requise dés le début des travaux et que celui-ci avait établi quatre factures, sans rechercher si certains désordres qui lui étaient imputés n'étaient pas de nature décennale ni caractériser la cause étrangère, laquelle ne peut résulter des fautes commises par les autres intervenants à l'opération de construction.



EXTRAIT DE L'ARRET DE LA COUR DE CASSATION :



« Vu l'article 1792 du code civil et l'article L. 111-24, devenu L. 125-2, du code de la construction et de l'habitation :



7. En application de ces textes, le contrôleur technique est, dans les limites de la mission à lui confiée, responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination. Une telle responsabilité n'a point lieu si le contrôleur technique prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.



8. Pour rejeter les demandes formées à l'encontre de la société BTP consultants, l'arrêt relève que, si la convention de contrôle technique a été conclue le 16 octobre 2008, celle-ci n'avait reçu aucun dossier de conception digne de ce nom lui permettant de rédiger un rapport initial de contrôle technique et n'avait été sollicitée pour la première fois qu'au mois d'avril 2010, plus de huit mois après la réception, de sorte qu'elle n'avait pu procéder à aucune constatation utile au cours des opérations de construction, n'ayant pu consigner, après achèvement, que les défauts de conformités, manques de finition, et désordres.



9. Il ajoute que son rapport initial n'aurait pas pu être établi au vu de « simples plans généraux » et qu'il est manifeste que, même si elle avait réclamé les pièces qui lui étaient nécessaires, elle n'en n'aurait pas obtenu davantage que l'expert judiciaire qui, malgré la durée des opérations d'expertise, n'a pu obtenir que des documents très partiels.



10. Il en déduit que le contrôleur technique ayant été ainsi empêché d'exécuter sa mission, la SCI et la société Etablissements Armand Mondiet ne justifient d'aucun manquement à sa mission en relation de cause à effet avec les préjudices dont elles se plaignent.



11. En se déterminant ainsi, après avoir constaté que l'expert avait noté que la présence du bureau de contrôle technique était requise dés le début des travaux et que celui-ci avait établi quatre factures, sans rechercher si certains désordres qui lui étaient imputés n'étaient pas de nature décennale ni caractériser la cause étrangère, laquelle ne peut résulter des fautes commises par les autres intervenants à l'opération de construction, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision. »

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