L'employeur peut-il consulter la clé USB du salarié à son insu ?
Publié le :
26/09/2024
26
septembre
sept.
09
2024
Si l'accès par l'employeur, hors la présence du salarié, aux fichiers contenus dans une clé USB personnelle non connectée à l'ordinateur professionnel, constitue une atteinte à la vie privée, le caractère illicite des preuves tirées de leur exploitation ne conduit pas nécessairement à les écarter des débats.
La cour d'appel de Lyon a ainsi rejeté le recours d'une salariée licenciée pour faute grave.
Après avoir relevé que l'employeur faisait valoir qu'il avait agi de manière proportionnée afin d'exercer son droit à la preuve, dans le seul but de préserver la confidentialité de ses affaires, les juges du fond ont d'abord constaté que celui-ci démontrait qu'il existait des raisons concrètes qui justifiaient le contrôle effectué sur les clés USB, au regard du comportement de la salariée qui, selon le témoignage de deux de ses collègues, avait travaillé sur le poste informatique d'une collègue absente et imprimé de nombreux documents qu'elle avait ensuite rangés dans un sac plastique placé soit au pied de son bureau soit dans une armoire métallique fermée.Les juges ont ensuite retenu que pour établir le grief imputé à la salariée, l'employeur s'était borné à produire les données strictement professionnelles reproduites dans une clé unique après le tri opéré par l'expert qu'il avait mandaté à cet effet, en présence d'un huissier de justice, les fichiers à caractère personnel n'ayant pas été ouverts par l'expert et ayant été supprimés de la copie transmise à l'employeur.
Dans un arrêt rendu le 25 septembre 2024 (pourvoi n° 23-13.992), la Cour de cassation considère que de ces constatations et énonciations, dont il ressortait que la production du listing de fichiers tiré de l'exploitation des clés USB était indispensable à l'exercice du droit à la preuve de l'employeur et que l'atteinte à la vie privée de la salariée était strictement proportionnée au but poursuivi, la cour d'appel, qui a déduit que les pièces relatives au contenu des clés USB litigieuses étaient recevables, a légalement justifié sa décision.
La chambre sociale a donc rejeté le pourvoi de la salariée.
EXTRAIT DE L'ARRET DE LA COUR DE CASSATION :
" 5. Il résulte de l'article L. 1121-1 du code du travail que l'accès par l'employeur, hors la présence du salarié, aux fichiers contenus dans des clés USB personnelles, qui ne sont pas connectées à l'ordinateur professionnel, constitue une atteinte à la vie privée du salarié.
6. Il résulte des articles 6 civil et 9 du code de procédure civile, que dans un procès civil, l'illicéité ou la déloyauté dans l'obtention ou la production d'un moyen de preuve ne conduit pas nécessairement à l'écarter des débats. Le juge doit, lorsque cela lui est demandé, apprécier si une telle preuve porte une atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit à la preuve et les droits antinomiques en présence, le droit à la preuve pouvant justifier la production d'éléments portant atteinte à d'autres droits à condition que cette production soit indispensable à son exercice et que l'atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi.
7. La cour d'appel, après avoir relevé que l'employeur faisait valoir qu'il avait agi de manière proportionnée afin d'exercer son droit à la preuve, dans le seul but de préserver la confidentialité de ses affaires, a d'abord constaté, par motifs propres et adoptés, que celui-ci démontrait qu'il existait des raisons concrètes qui justifiaient le contrôle effectué sur les clés USB, au regard du comportement de la salariée qui, selon le témoignage de deux de ses collègues, avait, courant juin et juillet 2017, travaillé sur le poste informatique d'une collègue absente et imprimé de nombreux documents qu'elle avait ensuite rangés dans un sac plastique placé soit au pied de son bureau soit dans une armoire métallique fermée.
8. Elle a, ensuite, relevé que pour établir le grief imputé à la salariée, l'employeur s'était borné à produire les données strictement professionnelles reproduites dans une clé unique (Verbatim 64 GB) après le tri opéré par l'expert qu'il avait mandaté à cet effet, en présence d'un huissier de justice, les fichiers à caractère personnel n'ayant pas été ouverts par l'expert et ayant été supprimés de la copie transmise à l'employeur, selon procès-verbal de constat en date du 11 septembre 2017.
9. De ces constatations et énonciations, dont il ressortait que la production du listing de fichiers tiré de l'exploitation des clés USB était indispensable à l'exercice du droit à la preuve de l'employeur et que l'atteinte à la vie privée de la salariée était strictement proportionnée au but poursuivi, la cour d'appel, qui a déduit, abstraction faite des motifs critiqués par le moyen mais qui sont surabondants, que les pièces relatives au contenu des clés USB litigieuses étaient recevables, a légalement justifié sa décision. "
Historique
-
Non-renvoi de QPC : absence de recours contre l'acte de notoriété
Publié le : 09/10/2024 09 octobre oct. 10 2024PublicationsActualitésDroit civil (03)La Cour de cassation a refusé de transmettre au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité relative à l’article 317 du code civil relatif à l’acte de...Source : www.legalnews.fr
-
Recours contre une sentence arbitrale : précisions sur la compétence du Conseil d'Etat
Publié le : 09/10/2024 09 octobre oct. 10 2024ActualitésDroit publicLe Conseil d'Etat est compétent pour connaître des recours dirigés contre les sentences arbitrales dans les litiges nés de l'exécution ou de la rupture d'un contrat administrati...Source : www.legalnews.fr
-
Le droit de préemption par les Safer n'est jamais obligatoire
Publié le : 16/09/2024 16 septembre sept. 09 2024ActualitésDroit publicL'article L. 143-2, 8°, du code rural et de la pêche maritime n'impose pas aux Safer l'usage du droit de préemption pour la protection de l'environnement et la mise en oeuvre de...Source : www.legalnews.fr
-
Contestation de l'authenticité de la signature du majeur protégé
Publié le : 06/09/2024 06 septembre sept. 09 2024ActualitésDroit civil (03)Viole l'article 465, alinéa 1er 4° du code civil l'arrêt d'appel qui juge valable un contrat d’assurance-vie conclu par un majeur en curatelle renforcée, assisté de son curateur...Source : www.legalnews.fr
-
Retardataires au théâtre : attention à la marche !
Publié le : 06/09/2024 06 septembre sept. 09 2024ActualitésDroit civil (03)La prudence s'impose aux retardataires des salles de spectacle. En effet, la cour d'appel de Riom a exonéré l’organisateur de sa responsabilité à hauteur de 80 % dans la chut...Source : www.legalnews.fr
-
Changements de destination sans travaux soumis à déclaration préalable
Publié le : 06/09/2024 06 septembre sept. 09 2024ActualitésDroit publicDans quel cas le changement de destination d'un hôtel en locations à fin d'habitation constitue-t-il une infraction au code de l'urbanisme ? Un particulier a acquis un terrai...Source : www.legalnews.fr