Le Conseil d'Etat sanctionne l'interdiction injustifiée du droit de manifester sur la voie publique
Publié le :
13/06/2020
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La liberté est la règle, et la restriction, l'exception : l'interdiction du droit de manifester sur la voie publique est illégale si elle n'est pas justifiée par la situation contextuelle.
Par une ordonnance rendue ce samedi 13 juin 2020, le juge des référés du Conseil d'Etat a suspendu l’interdiction générale et absolue de manifester sur la voie publique.
Il rappelle dans cette décision des notions basiques quant à la justification de toute mesure de police administrative qui, rappelons-le, est une mesure de contrainte, laquelle doit être toujours justifiée en fait et en droit.
Le juge des référés du Conseil d’État estime ainsi que l’interdiction de manifester n’est pas justifiée par la situation sanitaire actuelle lorsque les « mesures barrières » peuvent être respectées.
Dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire instauré pour faire face à l’épidémie de covid-19, l’article 3 du décret du 31 mai 2020 interdit les rassemblements, réunions ou activités réunissant plus de dix personnes dans l’espace public.
Divers associations et syndicats ont demandé au juge des référés du Conseil d’État de suspendre l’application de cette interdiction pour les manifestations dans l’espace public.
Le juge des référés relève que le Haut Conseil de la santé publique ne préconise, dans ses recommandations du 24 avril 2020, aucune restriction à la circulation dans l’espace public tant que les « mesures barrières » sont respectées (distanciation d’un mètre ou port du masque notamment), et qu’une reprise de l’épidémie n’est pas constatée. Alors que la liberté de manifester est une liberté fondamentale, le juge des référés en déduit que, sauf circonstances particulières, l’interdiction des manifestations sur la voie publique n’est justifiée par les risques sanitaires que lorsque les « mesures barrières » ne peuvent être respectées ou que l’événement risque de réunir plus de 5 000 personnes.
Le juge rappelle par ailleurs que, conformément à la loi, toute manifestation sur la voie publique doit faire l’objet d’une déclaration préalable à la mairie ou la préfecture, et qu’elle peut être interdite par les autorités de police ou le préfet, s’ils estiment qu’elle est de nature à troubler l’ordre public, y compris pour des motifs sanitaires, ou lorsque les circonstances locales l’exigent.
En conséquence, le juge des référés suspend l’exécution de l’article 3 du décret du 31 mai 2020, pour les manifestations sur la voie publique soumises à l’obligation d’une déclaration préalable.
Nous terminerons cette alerte en rappelant la célèbre formule énoncée par le commissaire du gouvernement Corneille dans ses conclusions sous l'arrêt Baldy rendu le 10 août 1917 par le Conseil d'Etat, principe repris et consacré par les arrêts ultérieurs, dont le célèbre arrêt Benjamin rendu le 19 mai 1933 : « La liberté est la règle, et la restriction, l'exception ».
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