Ce que doit contenir un mémoire en réclamation
Publié le :
03/01/2013
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Le 3 Octobre 2012, le Conseil d’Etat a rendu un arrêt didactique dans une affaire société Valterra et société Champagne épandage c/ Communauté d’agglomération Reims Métropole. En effet, cette décision apporte des précisions très intéressantes sur les mentions que doit contenir un mémoire en réclamation. Arrêt donc pédagogique pour les Pouvoirs Adjudicateurs et surtout pour les opérateurs économiques.
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE :
La communauté d'agglomération Reims Métropole a conclu, le 18 novembre 2002, un marché à bons de commande avec la société Champagne épandage et la société Traitement-Valorisation-Décontamination, aux droits de laquelle vient la société Valterra, pour l'enlèvement et la valorisation des boues produites par une station d'épuration.
Par jugement rendu le 25 mars 2010, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a condamné la communauté d'agglomération à verser, d'une part, une somme de 145 000 euros à la société Champagne épandage en compensation de son manque à gagner du fait de l'absence de commandes à hauteur du montant minimum du marché et, d'autre part, une somme de 249 514,42 euros à la société Traitement-Valorisation-Décontamination en indemnisation de son manque à gagner et de la détérioration de son matériel résultant de la mauvaise qualité des boues d'épandage.
Par arrêt en date du 17 mars 2011, la cour administrative d'appel de Nancy a fait droit à l'appel de la communauté d'agglomération en annulant le jugement de première instance et en rejetant les demandes indemnitaires des sociétés.
Les sociétés Valterra et la société Champagne épandage ont formé un pourvoi en cassation à l’encontre de cet arrêt, suivant pourvoi sommaire et mémoire complémentaire enregistrés respectivement au greffe du Conseil d’Etat les 16 mai et 3 août 2011.
Par arrêt rendu le 3 octobre 2012, le Juge du Palais Royal a rejeté le pourvoi et confirmé donc le raisonnement adopté par la cour administrative d’appel de Nancy.
DISPOSITION INVOQUEE DEVANT LES JURIDICTIONS SAISIES :
Article 34.1 du CCAG-FCS :
« Tout différend entre le titulaire et la personne responsable du marché doit faire l'objet de la part du titulaire d'un mémoire de réclamation qui doit être communiqué à la personne responsable du marché dans le délai de trente jours compté à partir du jour où le différend est apparu. »EXTRAIT DE L’ARRET :
« 3.Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 34.1 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés de fournitures courantes et services (CCAG-FCS) dans sa rédaction en vigueur à la conclusion du contrat : " Tout différend entre le titulaire et la personne responsable du marché doit faire l'objet de la part du titulaire d'un mémoire de réclamation qui doit être communiqué à la personne responsable du marché dans le délai de trente jours compté à partir du jour où le différend est apparu. " ; que pour rejeter, après évocation, la demande des sociétés, la cour administrative d'appel de Nancy a jugé que le courrier du 24 juillet 2006 par lequel elles ont demandé à la communauté d'agglomération Reims Métropole le paiement de la somme de 364 245 euros en indemnisation de la marge bénéficiaire manquée du fait du minima de commande non atteint et de la somme de 39 591 euros en raison de la détérioration de leur équipement résultant de la mauvaise qualité des boues, ne pouvait, en l'absence d'indication sur la base de calcul de ces sommes, être regardé comme un mémoire en réclamation au sens de l'article 34.1 du CCAG-FCS précité ; que ce faisant, la cour a écarté les moyens en défense des sociétés tirés de ce que ce cahier des clauses administratives générales n'impose pas la motivation des mémoires en réclamation et de ce qu'en l'espèce, le courrier du 24 juillet 2006 exposait le différend avec suffisamment de précision ; que, par suite, la cour n'a pas entaché son arrêt d'insuffisance de motivation ;
4. Considérant, en troisième lieu, qu'un mémoire du titulaire du marché ne peut être regardé comme une réclamation au sens de l'article 34.1 du CCAG-FCS que s'il comporte l'énoncé d'un différend et expose, de façon précise et détaillée, les chefs de la contestation en indiquant, d'une part, les montants des sommes dont le paiement est demandé et, d'autre part, les motifs de ces demandes, notamment les bases de calcul des sommes réclamées ; qu'ainsi, la cour administrative d'appel de Nancy n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que les mémoires en réclamations adressés par le titulaire du marché doivent présenter une contestation motivée du décompte incluant notamment la base de calcul de créances dont se prévaut le titulaire ; que par suite, la cour n'a pas entaché son arrêt de contradiction de motifs en estimant, par une appréciation exempte de dénaturation, que le courrier du 24 juillet 2006 n'était pas constitutif d'un mémoire en réclamation, faute de présenter les bases de calcul de la réclamation, tout en relevant que ce courrier comportait l'objet de cette réclamation ainsi que son montant global ; »
L’arrêt rapporté mérite d’être encadré pour son intérêt didactique et pédagogique. La cour administrative d’appel de Nancy rappelle les deux conditions pour qu’un document puisse recevoir la qualification juridique de mémoire en réclamation au sens de l’article 34.1 du CCAG-FCS :
- d’une part, il doit indiquer l’énoncé du différend avec le personne responsable du marché et exposé avec précision et force détail, les différents chefs de la contestation en en précisant les montants des sommes dont le paiement est réclamé;
- d’autre part, les motifs de ces demandes de paiement, ceux-ci devant comprendre notamment et principalement les bases de calcul des sommes réclamées.
ATTENTION donc, à défaut de telles mentions substantielles, le document ne pourra être qualifié de mémoire en contestation et devra être rejeté par la juridiction saisie, aucune session de repêchage n’étant prévu.
Patrick Lingibé
Membre Associé du Centre de Recherche sur les Pouvoirs Locaux dans la Caraïbe (CRPLC)
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